Ce que le tennis peut nous apprendre sur les placements

Toronto, Jeux panaméricains 2015. Joel Dembe s’apprête à servir pour la victoire. L’ancien numéro un canadien de tennis en fauteuil roulant sent ses mains trembler. « J’étais mort de trac, j’avais raté mon premier service avec une double faute », confie-t-il. « Je me suis ressaisi, j’ai pris une profonde respiration, puis j’ai envoyé un lob décisif par-dessus le fauteuil de mon adversaire pour remporter le match. »

Ce point a non seulement scellé la première médaille internationale du Canada en tennis en fauteuil roulant, mais incarne une réalité que les investisseurs connaissent bien. Pour gagner, que ce soit sur le terrain ou une plateforme de placements en direct, il faut savoir garder son sang-froid, choisir le bon moment, et suivre son plan sans céder à la pression.

Fort de son parcours en tant que numéro un canadien de tennis en fauteuil roulant, athlète paralympique à Londres en 2012 et médaillé aux Jeux panaméricains, Joel Dembe – désormais conférencier et premier directeur à RBC – nous livre quatre leçons inspirées du tennis, transportable au monde des placements.

Il n’est pas nécessaire de réussir chaque coup
Au tennis, aussi paradoxal que cela puisse sembler, il est possible de remporter un match tout en ayant perdu plus de points que son adversaire. « Ce qui compte, c’est de marquer les points décisifs », précise M. Dembe. Un joueur capable de garder son service et de tirer parti des balles de bris peut gagner le match, même s’il a commis plus d’erreurs que de réussites.

C’est un peu la même chose pour les investisseurs. Les achats d’actions ne sont pas forcément des coups gagnants, et même les FNB ou fonds communs de placement évoluent en dents de scie. Il importe d’adopter une vision à long terme, de suivre la stratégie établie pour permettre au portefeuille de croître au fil des ans.

Il est inutile de céder à la panique lorsqu’un placement ne progresse pas comme prévu. Pour citer Roger Federer : « Il faut savoir passer à autre chose après chaque point », ajoute M. Dembe. « Si tu envoies une balle dans le filet, tu ne peux pas laisser ce mauvais coup affecter tout ton match. » En d’autres termes, ne vous attardez pas sur une perte ou un échec. Ce n’est pas l’échec qui vous définit, mais la façon dont vous rebondissez.

La patience est primordiale
Plusieurs grands noms du tennis, comme Rafael Nadal ou Coco Gauff, ont fondé leur réussite sur une qualité essentielle : la patience. « Le mantra de Nadal, c’était : juste un coup de plus », explique M. Dembe. « L’idée, c’est de rester dans le jeu, de faire durer le point, et d’épuiser l’adversaire. »

Dans le domaine des placements, il est facile de se laisser emporter, de vouloir suivre la tendance du moment, d’acheter sans réfléchir ou de vendre sous l’effet de la peur. Mais cela peut faire dérailler un portefeuille. La croissance durable repose sur la discipline et la constance. « Une longue séquence bien menée finit souvent par payer », dit-il. « C’est tout comme en matière de placement à long terme. La patience l’emporte toujours sur l’impulsivité. »

Plutôt que de réagir à chaque occasion avec précipitation, choisissez la constance et la prise de risques mesurée.

S’adapter aux conditions changeantes
De la chaleur sèche de l’Alabama à l’humidité écrasante du Brésil, il fallait composer avec l’imprévu. Aucun tournoi ne se ressemble. « On ne joue jamais dans des conditions parfaites », souligne M. Dembe. Les terrains eux-mêmes imposent leurs règles : la terre battue ralentit le jeu, les surfaces dures l’accélèrent. Et un simple coup de vent peut ruiner un service. Sa stratégie? Toujours anticiper et s’adapter. « J’arrivais en avance pour m’acclimater et établir un plan de match selon mon adversaire », dit-il. « Même si je n’étais pas à mon meilleur niveau, je me disais : c’est la norme, il faut composer avec. »

Les placements peuvent être tout aussi imprévisibles. Entre les droits de douane, les hausses de taux, l’inflation et les tensions géopolitiques, il y a toujours un facteur qui peut vous forcer à vous adapter. Mais cela ne signifie pas qu’il faut abandonner sa stratégie. « Il y aura toujours des crises dans l’économie, toujours des titres alarmants », note M. Dembe. « Mais si vous restez fidèle à votre plan, vous finirez par gagner la partie. »

Il vaut mieux construire un portefeuille résilient pour faire face à l’imprévu. Une diversification efficace – par secteurs, régions et catégories d’actifs – permet de limiter les risques en cas de repli des marchés, tout en tenant compte de l’évolution possible des conditions économiques.

Maîtriser la psychologie du jeu
À la différence des sports collectifs, au tennis, il n’y a pas de refuge. « C’est juste vous sur le terrain », explique M. Dembe. « Toute la pression repose sur vous. »

Il a disputé de nombreux matchs serrés, où ses nerfs étaient le seul obstacle à la victoire. « Le mental et le comportement sur le terrain dictent souvent le résultat entre deux joueurs de même niveau », dit-il.

Les joueurs de tennis professionnels jouent souvent devant plusieurs milliers d’admirateurs enthousiastes, ce qui peut perturber leur concentration. M. Dembe se rappelle avoir disputé un match devant 7 000 spectateurs aux Jeux paralympiques de Londres, avec la plupart des applaudissements allant à son adversaire britannique.

La seule façon de surmonter ces défis, dit-il, est de se concentrer sur ce que l’on peut contrôler. Les investisseurs doivent eux aussi gérer le stress et le bruit ambiant, qu’il s’agisse des titres d’actualité incessants ou de la peur de faire le mauvais choix. Dans ces moments-là, il faut garder confiance et rester concentré. « Il y aura des moments de forte pression où vous aurez l’impression de devoir tout changer, mais la confiance en votre plan peut vous aider à éviter des erreurs coûteuses. »

En fin de compte, la réussite au tennis comme en placement repose sur la patience, l’adaptabilité et le calme sous pression, pas sur un coup d’éclat. Le lob final qui a valu à M. Dembe le bronze aux Jeux panaméricains? Ce n’était pas de la chance, mais un coup préparé avec son entraîneur. « J’ai respecté le plan », raconte-t-il. « J’ai pris le temps de ralentir, de ne pas paniquer. Un calme s’est installé, et j’ai frappé ce coup décisif. Pour les investisseurs, c’est exactement la même chose. »