La révolution de l’IA : compréhension de l’intelligence artificielle pour les investisseurs

L’intelligence artificielle (IA) peut sembler toute nouvelle et inédite, mais les scientifiques la conçoivent depuis le début du développement de l’informatique dans les années 1940 et 1950. Ce n’est qu’au cours des deux dernières années que le public a vraiment commencé à s’y intéresser. En novembre 2022, ChatGPT (le programme populaire qui permet aux gens d’interagir avec l’IA par la conversation) a été dévoilé au monde entier, captant l’imagination de tous, y compris des investisseurs.

Depuis lors, les sociétés de capital-risque, les fonds de capital-investissement et les investisseurs moyens investissent des milliards de dollars dans le secteur de l’IA, et certaines actions liées à l’IA ont connu une croissance importante ces deux dernières années. Selon une étude de Bloomberg Intelligence¹, l’IA générative (l’IA de type ChatGPT avec laquelle les gens peuvent interagir pour produire du texte, des images et du son, entre autres) pourrait constituer un marché de 1,3 billion de dollars d’ici 2032, affichant un taux de croissance annuel composé de 42 % au cours des dix prochaines années.

Cependant, même si tout le monde s’intéresse de près à l’avenir de l’IA, on ne sait toujours pas exactement comment cette technologie influera sur le monde et quelles sociétés en sortiront gagnantes. Il est donc difficile pour les investisseurs de savoir comment aborder ce secteur.

« Le secteur évolue vraiment rapidement, et certains de ces modèles sont époustouflants », explique Marcello Montanari, premier directeur général et premier gestionnaire de portefeuille, Actions nord-américaines, RBC Gestion mondiale d’actifs. « Mais personne ne sait vraiment où il va aller. »

Quel est le potentiel de l’IA?

Les attentes à l’égard de l’IA sont énormes et la plupart des experts s’accordent à dire qu’elle aura une incidence profonde sur la société. « Le développement de l’IA est aussi fondamental que la création du microprocesseur, de l’ordinateur personnel, de l’Internet et du téléphone cellulaire », a écrit Bill Gates sur son blogue² en 2023. « Elle changera la façon dont les gens travaillent, apprennent, voyagent, se soignent et communiquent entre eux. Des secteurs entiers se réorienteront autour d’elle. Les sociétés se distingueront par la qualité de leur utilisation de cette technologie. »

Selon une étude de McKinsey³, l’IA générative pourrait à elle seule apporter entre 2,6 et 4,4 billions de dollars US par an à l’économie mondiale à court terme. « En effet, il semble possible que d’ici trois ans, tout ce qui n’est pas lié à l’IA soit considéré comme désuet ou inefficace », a indiqué un rapport de McKinsey. De même, l’analyse de PwC⁴ a estimé que l’IA pourrait apporter jusqu’à 15,7 billions de dollars US à l’économie mondiale en 2030, soit plus que la production économique actuelle de la Chine et de l’Inde ensemble. Le Fonds monétaire international⁵ a déclaré que l’IA touchera près de 40 % des emplois dans le monde, remplaçant certains d’entre eux et en complétant d’autres.

M. Montanari ajoute qu’en dépit de l’incertitude quant à l’évolution du secteur de l’IA, « nous en voyons la puissance et nous comprenons que nous sommes désormais dans un paradigme technologique complètement différent ».

Certains secteurs commencent à prendre conscience du potentiel de cette technologie. Dans le domaine de la santé, l’IA générative est utilisée pour la découverte de médicaments⁶, et les scientifiques sont désormais en mesure d’étudier des millions d’ensembles de données biologiques pour voir comment différents médicaments peuvent interagir. Dans le domaine de l’aérospatiale, l’IA analyse les situations météorologiques⁷, les données de contrôle de la circulation aérienne, les émissions de carbone et bien d’autres choses encore, afin de trouver des itinéraires de voyage plus optimaux. Au niveau des employés, le personnel demande à l’IA de trouver des moyens d’améliorer un processus⁸, ce qui peut ensuite réduire fortement le temps consacré à une tâche.

« Les gains de productivité qui en résulteront seront probablement immenses », affirme M. Montanari. « Et quand on réunit différentes technologies pour créer quelque chose de nouveau, on obtient de véritables avancées. »

Décodage du secteur de l’IA

L’un des défis pour les investisseurs consiste à comprendre tous les éléments qui composent le secteur de l’IA (et ils sont nombreux). M. Montanari divise l’occasion de placement en deux catégories clés : les sociétés de facilitation et les sociétés de déploiement.

Les « sociétés de facilitation » comprennent les nombreuses sociétés qui créent l’infrastructure d’IA. « On pourrait les appeler les sociétés de matériel », explique-t-il. Il s’agit notamment des géants de la technologie : de grandes sociétés technologiques qui dépensent des milliards de dollars chaque trimestre pour développer des solutions d’IA pour leurs clients, leurs employés et le grand public. Certaines de ces entreprises fournissent également les infrastructures virtuelles nécessaires à l’exécution de la plupart des solutions d’IA.

Par ailleurs, il y a les sociétés qui produisent les semi-conducteurs, les serveurs, les réseaux de fibres optiques, les capacités de gestion des données et le refroidissement requis pour faire fonctionner des centres de données dont le nombre ne cesse de croître. Récemment, Jensen Huang, chef de la direction de Nvidia, le populaire fabricant de puces à semi-conducteur qui a bénéficié de l’intérêt des deux dernières années, a déclaré que le montant investi dans les centres de données doublerait pour atteindre 2 000 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années⁹.

L’IA requiert également d’énormes quantités d’électricité pour fonctionner. Selon Goldman Sachs¹⁰, le traitement d’une demande ChatGPT nécessite en moyenne dix fois plus d’électricité que celui d’une recherche Google. La société estime que la demande d’électricité pour les centres de données augmentera de 160 % d’ici 2030. Aujourd’hui, les centres de données consomment environ 1 % à 2 % de l’énergie totale, mais cette proportion passera à 4 % dans les six prochaines années. Autrement dit, les entreprises qui assurent la fourniture d’énergie électrique, telles que les services publics et les fabricants de transformateurs, et celles qui créent des matériaux comme le cuivre, profiteront de l’essor de l’IA.

Dans la catégorie des « sociétés de déploiement », on trouve les nombreuses sociétés qui bénéficieront de l’IA, comme les institutions financières, les organismes de soins de santé, les entreprises manufacturières, etc. Ces sociétés pourraient devenir plus efficaces, productives et novatrices. 

« Elles tireront profit du déploiement de l’IA dans l’ensemble de l’économie », déclare-t-il. « Ces sociétés disposent de grandes quantités de données exclusives qui permettent d’entraîner des modèles ou des algorithmes spécialisés. Une fois formés, ces modèles peuvent servir à améliorer ou à automatiser divers processus opérationnels. »

Où s’arrête l’IA?

Si vous vous intéressez à ce secteur, vous devez savoir que les applications révolutionnaires que beaucoup attendent prennent plus de temps à voir le jour que certains ne l’espéraient.

« Je crains surtout que le marché ne soit un peu trop optimiste quant à l’arrivée imminente de solutions d’IA sur le marché, car cela demande du temps », dit M. Montanari. « Dans la plupart des cas, nous en sommes encore à la période de prototypage. »

Plusieurs analystes réputés de Wall Street se sont récemment inquiétés de l’écart important entre les attentes de revenus liées à l’investissement dans l’infrastructure d’IA et la croissance réelle des revenus dans l’écosystème d’IA. David Cahn, de la célèbre société de capital-risque Sequoia Capital¹¹, appelle ce problème la « question à 600 milliards de dollars ».

Pourtant, la plupart des gens pensent que la révolution de l’IA aura lieu. Cependant, en raison de l’immensité du secteur de l’IA et du fait que nous n’en sommes qu’au début, M. Montanari souligne qu’il est difficile de prévoir les gagnants et les perdants de cette course.

« Comme le marché évolue rapidement, nous adoptons une approche par paniers en sélectionnant des sociétés bien diversifiées qui, à notre avis, seront gagnantes à terme », précise-t-il, en ajoutant que « nous ne nous attendons pas à ce que tous nos choix soient justes. Il s’agit d’un processus itératif. »

À l’instar de tout investissement, il est essentiel d’effectuer un contrôle diligent, de tenir compte des données fondamentales et de rester à l’affût des évolutions rapides.
 

Toutes les images de cet article ont été créées dans Firefly d’Adobestock. L’IA générative a été utilisée pour interpréter les mots « Ce que l’intelligence artificielle signifie pour l’investissement dans des actions ».

¹ _{Source: Bloomberg Professional Services, "Generative AI 2024 Report" (en anglais seulement)}

² _{Source: GatesNotes, "The Age of AI has begun", mars 2023 (en anglais seulement)}

³ _{Source: McKinsey & Company, "Beyond the hype: Capturing the potential of AI and gen AI in tech, media, and telecom", février 2024 (en anglais seulement)}

⁴ _{Source: PwC, "Global Artificial Intelligence Study: Sizing the prize" (en anglais seulement)}

⁵ _{Source: IMF Blog, "L’IA transformera l’économie mondiale. Faisons en sorte que l’humanité y soit gagnante", janvier 2024}

⁶ _{Source: National Library of Medicine, "Artificial intelligence in drug discovery and development", octobre 2020 (en anglais seulement)}

⁷ _{Source: The New York Times, "Artificial Intelligence Gives Weather Forecasters a New Edge", juillet 2024 (en anglais seulement)}

⁸ _{Source: MIT Management Sloan School, "How generative AI can boost highly skilled workers’ productivity", octobre 2023 (en anglais seulement)}

⁹ _{Source: Reuters, "Data centre boom reveals AI hype’s physical limits", juillet 2024 (en anglais seulement)}

¹⁰ _{Source: Goldman Sachs, "AI is poised to drive 160% increase in data center power demand", mai 2024 (en anglais seulement)}

¹¹ _{Source: Sequoia Capital, "AI’s $600B Question", juin 2024 (en anglais seulement)}